Seghir Lazri est sociologue à l’École des hautes études en sciences sociales. Photo DR
Seghir Lazri est sociologue à l’École des hautes études en sciences sociales. Photo DR
Quelle est la place de ce Paris Saint-Germain dans la culture football de la France ?
« Le PSG est un club historiquement ancré dans un territoire, celui de l’ouest parisien, avec des passionnés de foot et un côté élitiste, mais situé à proximité des abords de Paris attachés à une culture ouvrière, notamment à travers les usines Renault. Avec le rachat par le Qatar, la question de cet héritage se pose. Le club est passé dans une autre strate, celle de la mondialisation, du merchandising et du “soft power” dont la propriété est ailleurs, ce qui n’est pas le cas des autres clubs français. Cela crée de l’animosité. »
« Le PSG est aussi devenu un objet générationnel »
Cela fait-il du football un sport moins populaire qu’avant ?
« Au contraire, c’est devenu un objet d’engagement social. Le fait de se positionner pour ou contre le PSG est devenu politique. S’opposer au PSG, c’est s’opposer à une certaine forme de gouvernance du football, et à un sport globalisé. Ce qui n’empêche pas le football de rester un sport populaire, car toutes les couches de la société s’y retrouvent dans une forme de théâtralisation. C’est d’autant plus vrai pour le PSG, qui mobilise largement en dehors du cadre sportif, comme on le voit à chaque match avec les personnalités présentes dans les tribunes du Parc des princes.
Le PSG est aussi devenu un objet générationnel. Les gens s’identifient aux exploits sportifs auxquels ils assistent. Les 30-40 ans ont été acculturés au foot avec la victoire de l’OM, ceux qui ont 20-30 ans aux parcours européens de l’Olympique lyonnais, et quand on a 20 ans aujourd’hui, c’est avec les premiers exploits du PSG en Ligue des champions. Le club a suscité une adhésion chez les jeunes. »
Une autre équipe, celle du Paris FC, est en pleine expansion alors que le Paris Saint-Germain souhaite déménager du Parc des Princes pour s’installer en grande banlieue. Quel est l’avenir du club ?
« Le déménagement du PSG hors de Paris traduit un détachement de son histoire, de son antre et de sa représentation, vers une structure beaucoup plus globalisée, et une culture très différente du supporterisme qui capitalise sur d’autres espaces que celui des territoires. L’attachement devient alors plus idéologique. Et en s’installant hors de Paris, le PSG deviendrait un club plus francilien que parisien - un peu comme le Real Madrid est le club du roi d’Espagne, quand l’Atletico est celui des Madrilènes. Derrière ce mouvement, il y a toujours eu l’idée de créer un autre club qui endosserait ce que le PSG abandonne. C’est un mécanisme naturel, que l’on a notamment vu en Angleterre. »